Le déménagement du parent qui bénéficie de la résidence habituelle des enfants à son domicile
Suite à la séparation du couple, le Juge aux Affaires Familiales fixe la résidence du ou des enfants au domicile de l’un des deux parents, ou, de manière alternative au domicile de chacun des parents : l’on parle alors de résidence alternée.
L’alternance du temps n’est pas nécessairement égalitaire, et peut être fixée selon un rythme variable (semaine entière, moitié de semaine, quinzaine…).
Encore faut-il rappeler qu’en la matière, la fixation de la résidence des enfants n’est jamais gravée dans le marbre et peut toujours être revue au regard d’éléments nouveaux : changement d’école, âge des enfants, remariage difficile à vivre pour eux ….
Parmi les circonstances propres à permettre au Juge de statuer à nouveau il faut noter le déménagement de l’un des deux parents.
Ainsi l’article 373-2 du Code civil dispose :
"La séparation des parents est sans incidence sur les règles de dévolution de l’exercice de l’autorité parentale.
Chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l’enfant et respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent.
Tout changement de résidence de l’un des parents, dès lors qu’il modifie les modalités d’exercice de l’autorité parentale, doit faire l’objet d’une information préalable et en temps utile de l’autre parent. En cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le Juge aux Affaires Familiales qui statue selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant. Le juge répartit les frais de déplacement et ajuste en conséquence le montant de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant."
Au regard de cet article, et si l’éloignement des deux domiciles ne permet plus une résidence alternée ou l’exercice aussi fréquent des droits de visite et d’hébergement de l’autre parent, il est impératif d’anticiper et d’encadrer ce déménagement, sous peine de s’exposer à un transfert de résidence et à un exercice exclusif de l’autorité parentale…
La jurisprudence fait en effet une application très stricte de l’article 373-2 du Code civil, et ceci aux fins de protéger tant l’enfant que celui des parents qui subit l’éloignement.
De nombreux parents hélas oublient bien souvent et un peu vite que la résidence des enfants peut être revue par le Juge aux Affaires Familiales.
Et les cas de transfert de résidence à cette occasion ne sont pas rares.
Voici deux exemples éloquents aux fins de nourrir la réflexion de celles et ceux qui envisagent un déménagement :
1. J’ai été consultée par une jeune femme de 28 ans, assistante maternelle de son état, mère dévouée et aimante d’une petite fille de deux ans qui souhaitait quitter la région où elle se trouvait pour suivre son nouveau compagnon, à 300 kilomètres de là…
Aucune raison professionnelle ne justifiait ce déménagement, et elle s’était bien cachée d’en informer le père de la fillette. Précisions que la résidence de l’enfant était fixée alternativement au domicile de chacun des parents, une semaine sur deux….
Moins de quinze jours avant la date fatidique (qu’elle n’a pas voulu reporter), nous n’avons eu d’autre choix, face à un refus immédiat du père, que de saisir le juge statuant en matière de référés.
Ce qui devait arriver arriva : la résidence de l’enfant fut confiée au père, le juge estimant que la mère faisait preuve d’une légèreté blâmable, en bafouant les droits de l’autre parent. Ce cas a été confirmé sans surprise par la Cour d’Appel.
2. Une autre jeune femme d’une trentaine d’années, en instance de séparation et mère d’une fillette de 4 ans m’a contactée aux fins d’organiser son déménagement du domicile commun.
Elle souhaitait s’établir à 150 kilomètres de là pour se rapprocher de sa famille et retrouver un travail. Le père souhaitait également obtenir la résidence de l’enfant. Je lui ai alors conseillé de l’informer le plus précisément et le plus tôt possible de sa volonté et des modalités pratiques qu’elle souhaitait instaurer pour le bien être de la fillette (descriptif de l’appartement, choix de la crèche, date de départ, modalités d’exercice des droits de visite et d’hébergement proposées…)
Lors de l’instance de référé intentée par le père, le magistrat a confié la résidence de l’enfant à la mère, estimant que si son emploi du temps lui permettait de passer beaucoup de temps avec la fillette, elle avait avant tout mis tout en œuvre pour respecter la principe d’autorité parentale conjointe, et ainsi laisser au père toute sa place malgré l’éloignement subi par celui.
Ces deux cas sont parfaitement révélateurs de la jurisprudence actuelle : un déménagement doit être préparé, l’autre parent doit être informé le plus tôt et le plus précisément possible. Le parent le plus méritant a toute chance de voir la résidence de son enfant transférée chez l’autre parent dès lors que ce dernier est mis au pied du mur.